CHRONIQUES SUR LE DEUIL

Côtoyer un endeuillé par suicide

S-u-i-c-i-d-e. Ce mot est d'une telle violence et lourdeur que simplement l'évoquer semble faire fuir tous les autres mots. Le vide se crée. Quoi penser, quoi dire lorsqu'il est question du suicide? Nous devenons de glace devant cette réalité, figés devant la gravité du geste. Quelqu'un s'est enlevé la vie... Tout en nous se crispe. Il s'agit de tant de douleur. D'abord pour celui qui a choisi de partir. Et maintenant pour ceux qui restent.

Nous sommes secoués, juste à penser au drame que vivent ces proches endeuillés. Comment, dans ce cas, parvenir à les aider? Perdre quelqu'un qu'on aime est en soi une expérience bouleversante. Alors, que dire lorsque le deuil est lié à une mort par suicide? Suite à laquelle la culpabilité devient étouffante? Une mort qui laisse derrière elle mille questions en suspens: « Mais pourquoi a-t-il choisi de partir? Est-ce que c'était un geste impulsif? A-t-il envoyé des signaux d'alarme? » Des questions qui tournent en boucle, jour et nuit. Difficile d'entreprendre la traversée du deuil alors que la tête cherche frénétiquement des réponses et que le cœur se noie dans le blâme.  

Les endeuillés par suicide sont profondément blessés, nous le savons bien. C'est d'ailleurs pourquoi nous nous sentons bien souvent malhabiles devant eux. Nous ne savons pas toujours comment agir en leur présence: Est-ce ridicule de leur demander comment ça va? Pouvons-nous leur témoigner notre soutien ou devons-nous plutôt demeurer discrets? Faut-il parler ou non de la personne décédée? À défaut de savoir quoi faire, nous pouvons être tentés de demeurer distants. Laisserons-nous vraiment notre malaise avoir une telle influence? Bien que nos gestes d'affection et de sympathie soient teintés d'hésitations, ils demeurent plus apaisants que rien du tout. Osons donc nous adresser aux endeuillés par suicide. Du réconfort, ils en ont tant besoin.

Mélissa Raymond
Travailleuse sociale

Retour à la liste des chroniques

Mélissa Raymond
Chroniques par :

Mélissa Raymond

travailleuse sociale